Critique film
Publié le 28/11/2017 à 16h29 par Kévin Aubin
Good Time
9 /10

Un braquage qui tourne mal… Connie réussit à s'enfuir mais son frère Nick est arrêté. Alors que Connie tente de réunir la caution pour libérer son frère, une autre option s'offre à lui : le faire évader. Commence alors dans les bas-fonds de New York, une longue nuit sous adrénaline.

Les frères Joshua Safdie et Ben Safdie sont des réalisateurs de films indépendants américains, originaires de New York. Ils ont fondé avec d'autres personnes actifs dans le cinéma le collectif Red Bucket Films, une société de production indépendante. C'est Joshua Safdie qui se lance en premier dans la réalisation d'un premier long-métrage avec The Pleasure of Being Robbed, présenté à la Quinzaine des réalisateurs en 2008. S'en suit une réalisation conjointe avec son frère Ben, Lenny and the Kids, présenté à la Qunzaine des réalisateurs en 2009 sous le nom Go Get some Rosemary. Le film s'inspire de l'enfance des deux frères et montre la relation d'un père divorcé avec ses deux enfants. En parallèle, ils réalisent quelques courts-métrages dont un qui obtient le Prix du court-métrage américain au festival du film de Sundance en 2012.

En 2017, il reviennent avec leur nouveau film Good Time, sélectionné en compétition officielle pour la Palme d'or au Festival de Cannes. Autant le dire tout de suite, voir ce film c'est vivre une expérience cinématographique hors-norme. Obsédés par les marginaux et plus particulièrement les américains oubliés, les frères Safdie signe un thriller sous haute tension. Le spectateur est dès les premières minutes embarqués dans un grand huit où il ne pourra relâcher son souffle qu'une fois le générique de fin terminé. Bad trip survolté à la fois sensoriel et graphique, ce film se doit d'être vécu au moins une fois et marque après coup. Lorgnant sur le cinéma indépendant voire de genre, tout est fait pour décontenancer le spectateur et lui faire vivre un moment intense et jouissif. Suivre le temps d'une nuit un homme embarqué sous adrénaline dans les bas-fonds de New York pour sortir son frère de prison peut paraître sur le papier déjà-vu. Mais c'est sans compter sur le talent des deux frères réalisateurs que le film sort du lot. Hypnotisant, électrisant, assourdissant sont les quelques superlatifs que l'on peut employer pour essayer de catégoriser ce métrage. Si l'expérience dans une salle de cinéma avec ce long est unique, le scénario est quant à lui bien maigre. La grande faiblesse est l'écriture laborieuse de l'histoire qui se cherche sans se trouver et finit par ne pas raconter grand-chose au final. C'est dommage car avec une telle proposition, et si le scénario aurait suivi, le film aurait été une œuvre majeure de notre temps. Parce qu'il faut bien dire que techniquement le métrage est une dinguerie.

Derrière leur caméra, les frères Safdie expriment toute l'étendue de leur talent. La mise en scène au plus proche de son personnage principal vaut à elle seule le déplacement, les décors entre lieux clos et ville nocturne sont là pour créer une atmosphère oppressante qui joue sur l'urgence, la photographie aux couleurs sombres et froides, qui joue sur les effets visuels avec des lumières criardes, est d'une beauté subjuguante et la bande-son moderne, électro et teintée d'influences diverses, omniprésente, fait sensation. Très esthétique, la réalisation est tout simplement à couper le souffle.

Robert Pattinson, avec des rôles plus mineurs au cinéma ces derniers temps, trouve ici l'un de ses meilleurs rôles. Un premier rôle où il fait fi de son talent d'acteur pour électriser l'écran de par sa présence quasi mystique. Il est là sans être là comme un homme en dehors de la société actuelle qui vagabonde au gré de ses envies. Sur chaque plan, il emporte tout sur son passage et avec peu de lignes de dialogue arrive à ce que le spectateur n'est d'yeux que pour lui. Autour de lui viennent de nombreux acteurs pour la plupart inconnus du grand public viennent jouer leur partition avant de s'éclipser. Des acteurs qui tirent leur épingle du jeu sans jamais cacher Robert Pattinson qui reste le personnage central du film. Mention spéciale à Ben Safdie, l'un des deux réalisateurs, qui dans le rôle d'un jeune homme handicapé est étonnant, et à Jennifer Jason Leigh qui compose ici une femme désabusée marquante.

Pour leur nouvelle réalisation, les frères Safdie délivrent une belle leçon de cinéma. A vivre comme une expérience dont chacun se fera sa propre opinion, c'est indéniablement du grand art. Dommage que l'écriture du scénario fasse défaut mais malgré cela c'est une découverte cinématographique à voir au moins une fois.

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