Critique film
Publié le 29/12/2017 à 11h32 par Kévin Aubin
Mise à Mort du Cerf Sacré
8,5 /10

Steven, brillant chirurgien, est marié à Anna, ophtalmologue respectée. Ils vivent heureux avec leurs deux enfants Kim, 14 ans et Bob, 12 ans. Depuis quelques temps, Steven a pris sous son aile Martin, un jeune garçon qui a perdu son père. Mais ce dernier s’immisce progressivement au sein de la famille et devient de plus en plus menaçant, jusqu’à conduire Steven à un impensable sacrifice.

Yórgos Lánthimos démarre sa carrière dans les années 90 en collaborant avec une compagnie de danse pour laquelle il réalise une série de vidéos. Il se lance ensuite dans la réalisation de publi­ci­tés, de courts-métrages et de clips. Il se fait remarqué en 2009 avec sa troisième réalisation, Canine, qui remporte le Prix Un certain regard au Festival de Cannes. S'en suivent deux autres réalisations, elles aussi primées et remarquées qui lui valent un bon accueil critique et public.

Avec un cinéma unique et inclassable, il récidive en 2017 avec Mise à Mort du cerf sacré, qui reçoit le Prix du scénario au dernier Festival de Cannes. Un film qui présente un personnage principal masculin qui est forcé de faire des choix drastiques, voire même sacrificiels. Sorte de drame fantastique, cet ovni cinématographique dérange autant qu'il passionne. Un film audacieux et exigeant à ne pas mettre à la vue de tout le monde. Revisitant le mythe d'Iphigénie telle une tragédie grecque moderne lorgnant sur le thriller psychologique, il est difficile de se faire un avis tranché après visionnage. Le film suit la dislocation d'une famille américaine infiltrée par un adolescent perturbée. Un jeu de faux-semblants, du chat et de la souris va ainsi se mettre en place sous nos yeux, et ce, de façon très lancinante. Avec un rythme lent à la limite du contemplatif à certains moments, le film déroule l'histoire voire les histoires des personnages composant une famille. On apprend énormément de choses sur leur vie, leurs comportements amoraux et parfois égocentriques; des sentiments inavouables qui renvoient à ce que nous sommes ou ce que nous pouvons être en tant qu'être humain. Le réalisateur sonde l'âme humaine jusque dans ses plus bas instincts, troublant mais tellement réaliste. Et Lánthimos n'hésite pas à choquer, éprouver son spectateur à la limite de la gêne voire du dégoût. Une pièce unique à l'avant-garde du cinéma contemporain ?

Une fois encore, Yórgos Lánthimos signe une réalisation propre à son style. La mise en scène est pompeuse mais dans le bon sens du terme avec des cadrages somptueux, les décors très minimalistes renvoient à un sentiment d'oppression, la photographie est d'une pâleur et d'une froideur quasi-chirurgicales, et la bande-son quasi-inexistante recèle exclusivement de morceaux classiques et de sons stridents à vous glacer le sang. Minutieuse et réfléchie, une réalisation déconcertante qui convient parfaitement à ce film de genre.

Colin Farrell retrouve le réalisateur pour la seconde fois après The Lobster et il est impeccable. A l'aise dans tous les genres de film, il confirme une nouvelle fois son talent d'acteur. Pour l'accompagner, on retrouve Nicole Kidman, elle aussi impeccable. Tout en simplicité avec son naturel qu'on lui connaît, elle compose un formidable duo avec son homologue masculin. La révélation du film tient inévitablement dans le jeune acteur Barry Keoghan. Il électrise de par sa présence presque mystique chaque plan où il apparaît. Un jeune homme à suivre de très près.

Pour sa nouvelle réalisation, Yórgos Lánthimos continue de creuser le sillon d'une filmographie à part entière qui ne peut pas plaire à tout le monde. Une œuvre sortie de nulle part qui fait indéniablement son effet sur le spectateur. Une pure expérience de cinéma à vivre au moins une fois.

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