A l'heure où les développeurs et les distributeurs, frileux, n'osent enchaîner que des suites de jeux à succès, minimisant ainsi leur risque, il reste toutefois des artisans audacieux : sans nul doute, Nippon Ichi Software fait partie du peloton de tête.
En assurant ses arrières avec sa série phare de T-Rpg, Disgaea, NIS se débrouille pour nous pondre régulièrement, et en parallèle, des petits jeux au concept et au design bien affirmés. Mieux, ils ne sont bien souvent que des "one-shot" (à l'exception notable de Yomawari...) et Poison Control vient grossir les rangs.

Dans ce nouveau titre aux relents de Shôjo manga, le joueur incarne un avatar (garçon ou fille) dépossédé de son corps et assisté d'une succube répondant au charmant nom de "Poisonette". Le protagoniste se retrouve à errer dans un enfer de pacotille (le Maiden Hell), pavé des désillusions émotionnelles de jeunes femmes tombées en ce lieu... Partageant donc le même corps et les mêmes objectifs, Poisonette et le joueur vont s'employer à nettoyer chaque zone afin de purifier les âmes féminines imprégnant chaque terrain de jeu (les Hell's Belle).

Un scénario plutôt classique donc à base de side-kick improbable, d'amnésie, et de nymphettes à secourir, le tout à la sauce gothic lolita que les otakus japonais adorent. Toutefois, si vous connaissez un peu la société japonaise et ses travers, vous ne manquerez pas de lire entre les lignes et d'apprécier un sous-texte plus finaud qu'il n'en a l'air, et bien souvent dans l'air du temps. Le tout est présenté avec des graphismes très colorés (bariolés?), un chara-design séduisant et surtout, un doublage en VO japonaise très convaincant. Poisonette aligne les punch-lines avec brio et le duo de la Higan Radio n'est pas sans rappeler les meilleurs moments de Perle et Coralie dans "Splatoon 2".
Ce n'est d'ailleurs pas le seul clin d'oeil au blockbuster de Nintendo : Poison Control est, en effet, un jeu de tir à la 3ème personne où votre avatar devra nettoyer méthodiquement chaque labyrinthe. Pour ce faire, son corps devra se dissocier de celui de Poisonette, laquelle prendra le relai en purifiant les éclaboussures toxiques qui jonchent le sol.
Dans les faits, il s'âgira donc d'alterner entre vos deux personnages, en esquivant les tirs des ennemis, les dégommer avec votre viseur (une arme remplace votre bras...) et nettoyer le poison qui vous entoure en faisant simplement courir Poisonette à sa surface.
Ce gameplay dual est très facile à comprendre et à prendre en main. Le problème, c'est que le jeu est vite répétitif dans sa structure et ne propose que d'enchaîner de nombreux labyrinthes. Certes, vous pourrez accumuler des pièces pendant votre nettoyage intensif et acheter de nouvelles armes. Dans le même ordre d'idée, de nombreux coffres se cachent dans le décor ou apparaissent si vous vous débarrassez d'un certain pourcentage de poison, mais les à-côtés sont assez minces.

Il se dégage toutefois de ce petit jeu un charme certain : l'aspect électrique et pop des décors, certes peu travaillés mais donnant un aspect très lisible à l'ensemble, la qualité des musiques et surtout du jeu d'acteur. Ce dernier compense avec la mise en scène austère des cut-scenes, façon visual novel du pauvre. En tout cas, on sent bien que l'équipe responsable des doublages a fait son maximum pour donner de la vie et de l'entrain à une aventure qui ne manque généralement pas d'humour, même si quelques passages sont moins légers ou triviaux.

En somme, "Poison Control" est un shooting-novel qui apporte un peu de légèreté à un univers video-ludique aujourd'hui très formaté. Heureusement affublé d'une durée de vie assez courte (comptez moins de 8 heures en prenant le temps), il évite ainsi de devenir inutilement redondant et sait nous offrir son dénouement au bon moment. Toujours proposé en VO sans sous-titrage français, les curieux apprécieront sa fraîcheur et son design général. Un petit casse-croute bien sympa !