Critique film
Publié le 21/12/2017 à 17h50 par Kévin Aubin
Au Revoir Là-Haut
10 /10

Novembre 1919. Deux rescapés des tranchées, l'un dessinateur de génie, l'autre modeste comptable, décident de monter une arnaque aux monuments aux morts. Dans la France des années folles, l'entreprise va se révéler aussi dangereuse que spectaculaire...

Albert Dupontel se forme à la comédie à la fin des années 80 au Théâtre National de Chaillot. C'est à cette période qu'il débute sur grand écran dans La Bande des quatre de Jacques Rivette et Encore de Paul Vecchiali. Mais c'est en 1991, sur scène que le comédien se fait véritablement connaître du grand public avec son one man show Sale spectacle, qu'il joue à l'Olympia. Son humour féroce et décalé en fait alors l'un des artistes les plus originaux de l'époque. En 1996, il réalise son premier long-métrage, Bernie, comédie dramatique décapante et provocatrice qui ne fait pas l'unanimité, mais qui permet d'imposer la personnalité de Dupontel. Par la suite, ce comédien rare et exigeant confirme son désir d'éclectisme dans le paysage cinématographique français, alternants films de tous genres. En parallèle de sa carrière d'acteur, il continue de réaliser quelques longs-métrages pour le cinéma.

En 2017, Dupontel met en scène Au revoir là-haut, adaptation ambitieuse d'un roman de Pierre Lemaitre se déroulant dans le Paris des années folles. Enfin une œuvre à la hauteur d'un cinéma français qui peine parfois à se renouveler. Une œuvre cinématographique telle une déclaration d'amour pour le cinéma. Un chef d'œuvre instantané qui permet à Dupontel d'exprimer toute l'étendue de son talent à la fois d'acteur et de réalisateur. Avec un budget confortable, le film magnifie son matériau d'origine pour offrir une ode à la vie, à la liberté. Dénonçant les agissements de la France qui s'occupait davantage des morts que des vivants après la première guerre mondiale, le réalisateur signe un pamphlet sur l'après-guerre tout en y apportant sa patte artistique. Résultat, c'est une comédie dramatique qui fourmille d'idées, qui côtoie le merveilleux avec un réalisme unique et saisissant teinté de poésie à laquelle le spectateur assiste. Passant par toutes les émotions, le film mélange habilement les genres dans une histoire certes fictionnelle mais très proche de la réalité de l'époque. On suit les pérégrinations d'un duo de rescapés, Albert Maillard et Édouard Péricourt, tous deux embarqués dans une arnaque audacieuse et semée d'embûches. Une aventure humaine ancrée dans un univers farfelu, coloré, mais aussi tendre et emprunt de magie. Au cours de ce véritable festival, nombreux seront les personnages rencontrés tous plus atypiques les uns que les autres à la personnalité bien affirmée.

Tel un magicien usant de sa caméra comme d'une baguette magique, Albert Dupontel est à son meilleur et signe un film qui lui ressemble, imprévisible. La mise en scène est fastueuse, les décors sont d'une beauté sidérante notamment les costumes qui font vivre le film, la photographie très picturale est sublime et la bande-son s'inscrit parfaitement dans l'ambiance générale du métrage à la fois lourde de sens et légère. Une réalisation folle comme le film que seul un homme comme Dupontel pouvait nous offrir. Du très grand 7ème art.

Officiant également devant la caméra, Albert Dupontel est exceptionnel dans le rôle d'un homme mutilé psychologiquement par la guerre. Un homme ordinaire pas si bête, émouvant avec un peu d'humour. Une très belle composition de la part de l'acteur. On retient surtout la performance ahurissante de Nahuel Perez Biscayart, jeune acteur argentin, qui malgré l'absence de parole de son personnage et affublé de nombreux masques, arrive à nous cueillir. Énigmatique et plein de malice, ce rôle est taillé sur-mesure pour l'acteur qui confirme son talent après son rôle dans 120 battements par minute. Avec eux, de nombreux acteurs français tous très impliqués dans leur rôle respectif où chacune de leurs apparitions est légion. Un casting royal qui offre au film toutes ses lettres de noblesse dans le sens où c'est une belle et grande œuvre qui ressuscite le grand film populaire français avec une élégance rare.

Pour sa nouvelle réalisation, Albert Dupontel signe enfin son grand film telle une superproduction française qu'il rêvait tant. Du vrai cinéma comme on en voit peu aujourd'hui qui fait plaisir à voir. Assurément l'un des meilleurs films si ce n'est le meilleur film français de cette année 2017.

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