Critique film
Publié le 26/01/2018 à 11h11 par Kévin Aubin
Le Brio
9 /10

Neïla Salah a grandi à Créteil et rêve de devenir avocate. Inscrite à la grande université parisienne d’Assas, elle se confronte dès le premier jour à Pierre Mazard, professeur connu pour ses provocations et ses dérapages. Pour se racheter une conduite, ce dernier accepte de préparer Neïla au prestigieux concours d’éloquence. A la fois cynique et exigeant, Pierre pourrait devenir le mentor dont elle a besoin… Encore faut-il qu’ils parviennent tous les deux à dépasser leurs préjugés.

Yvan Attal débute au théâtre en 1988 avant sa rencontre avec le réalisateur Éric Rochant qui va lancer sa carrière au cinéma. Ainsi, il joue aussi bien des héros tourmentés et les mauvais garçons que des rôles plus sentimentaux. En 2001, il passe pour la première fois derrière la caméra avec Ma femme est une actrice dans lequel il se met en scène aux côtés de sa compagne Charlotte Gainsbourg. Il continue de réaliser des films principalement des comédies mais n'en n'oublie pas pour autant sa carrière d'acteur. Il joue dans des thrillers, participe à des films étrangers et campe des rôles physiques.

En 2017, il revient à la réalisation avec Le Brio, dans lequel un professeur de droit aux méthodes provoquantes prépare une étudiante en première année de droit à un prestigieux concours d'éloquence. Qu'il est bon de voir ce genre de film dans le cinéma français. Une "dramedy" simple et efficace qui recèle bon nombre d'idées. Yvan Attal cherchant à la fois à faire rire grâce à des dialogues finement écrits et toucher voire question ses spectateurs. Le résultat est un parfait mélange entre une comédie légère sur une rencontre impromptue et un drame sur le choc des cultures et des générations. En mettant en avant le prestigieux concours d'éloquence qui a lieu chaque année entre universités, le réalisateur veut montrer autres choses aux spectateurs. Comme toile de fond, il déroule un plaidoyer sur le bon vivre-ensemble et les préjugés au travers les personnages de Pierre Mazard et Neïla Salah. Une confrontation s'engage alors entre cet homme et cette jeune femme issus de milieux différents. C'est certes un peu déjà-vu mais c'est amené différemment et avec intelligence. On sent de la part du réalisateur d'insuffler quelque chose de nouveau dans ce rapport au monde, à ces deux mondes. Va s'en suivre des joutes verbales délectables, des déconvenues jubilatoires et surtout des moments plus intimes qui amènent à réfléchir. Un film dans l'air du temps qui parle à tous, et ce, dans son plus simple appareil. Les mots ont dans ce film une grande importance et entraînent chaque scène de façon crédible entre rire et émotion.

Yvan Attal, bien que connu comme acteur, est ici réalisateur pour la cinquième fois. La mise en scène profite aux acteurs, les décors rendent crédibles et réalistes l'ensemble du film, la photographie très naturelle est là pour signifier que tout ce qui se passe dans le film aborde des vérités et la bande-son s'apprécie comme le film, agréablement. Une bonne réalisation qui rend honneur à ce joli film.

Yvan Attal met en scène deux générations d'acteurs. D'un côté on retrouve avec un immense plaisir un Daniel Auteuil au plus haut de sa forme. Prof de droit émérite, à la fois cynique et provocateur, il s'amuse à jouer ce rôle où il est totalement crédible et hallucinant de réalisme. De l'autre on retrouve dans son premier grand rôle au cinéma Camélia Jordana. Jeune étudiante en droit, à la fois fragile et déterminée, aux idées bien affirmées, elle joue admirablement ce rôle. Une révélation qui confirme un talent d'actrice naissante.

Pour sa nouvelle réalisation, Yvan Attal signe un film agréable à regarder aux propos qui sonnent toujours justes. Inscrit dans notre actualité, le film mêle habilement la comédie et le drame. Cerise sur le gâteau, le film est servi par un duo d'acteurs absolument formidable. Une belle rencontre de cinéma.

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