S'il y a bien une console qui se prête parfaitement au genre du Metroidvania, c'est certainement la Nintendo Switch ! Ce style de jeu ne demande pas des capacités techniques ébouriffantes et il est toujours agréable d'interrompre et de reprendre notre exploration au pied levé. Les représentants de qualité ne manquent pas sur cette bécane : l'inénarrable "Hollow Knight" ou la série "Ori" sont incontournables (on a déjà oublié le très médiocre "Metroid Dread"...).
Le jeune studio chinois TiGames se lance donc avec sa propre vision du genre, en n'oubliant pas de s'inspirer des meilleurs élèves. Un essai réussi ?

F.I.S.T se déroule dans un monde Diesel-Punk particulièrement travaillé : dès l'écran titre, on comprend que l'ambiance va jouer un rôle particulier... Imaginez Hong Kong dans les années 60, le tout mélangé à Blade Runner, le Midgar de FF7 et une pincée d'Akira ! Torch City ne manque pas de charme, c'est certain, et les nombreuses zones annexes non plus. Tournant sur l'Unreal Engine, F.I.S.T accroche immédiatement le joueur, en mode docké ou nomade. Les artistes du studio de développement se sont appliqués afin de rendre chaque endroit assez unique et le résultat défonce déjà le très fade "Metroid Dread" ! Que ce soit la vieille ville, l'usine électrique, le métro ou les égouts, vous allez voir du pays . Sans compter le reste...

Vous incarnez le lapin Rayton, un héros à la retraite qui se la coule douce en sirotant son jus de carotte préféré dans le bouge du coin. Six années ont passé depuis son heure de gloire et, entre temps, Torch City a basculé dans la répression Orwelienne des Chiens d'Acier. Peu importe, tant qu'on laisse notre ami tranquille. Seulement voilà : un jour, son pote mécanicien, l'ours Urso, est envoyé en prison et Rayton reprend du service pour le délivrer des griffes de la Légion. Et pas avec n'importe quelle arme : que diriez-vous d'un énorme poing mécanique en acier qui frappe fort ?

Comme tout bon Metroidvania, les capacités de Rayton vont s'étoffer peu à peu : nouvelles armes (la foreuse-ventilateur et le fouet électrique), nouvelles capacités (double saut, dash multi-directionnel, etc...), nouveaux combos... Inutile de dire qu'il n'est jamais superflu de revenir sur ses pas pour débloquer un accès auparavant interdit ou impossible à franchir, les nouvelles compétences permettant souvent d'ouvrir de nouvelles voies ou d'accéder à de nombreux trésors (argent, disque dur, affiches collector, graines...). On peut bien entendu booster la barre de vie ou de coups spéciaux, dépenser son pécule dans les nombreuses échoppes : explorer en profondeur récompense toujours le joueur curieux, à condition de réussir des séquences de plate-formes parfois tendues (celles des mines, par exemple...).
Des sortes de pods enterrés dans le sol permettent de se régénérer régulièrement ou d'accéder à un arbre de compétence : moyennant les disques durs trouvés ça et là, et contre quelques espèces sonnantes et trébuchantes, Rayton aura accès à de nouveaux combo ou attaques pour ses 3 armes principales. Certains sont rapides et faibles, d'autres lents à charger mais dévastateurs ! En fonction de votre façon de jouer et d'aborder les combats, il y aura pleins de combos à tester. Et avec un peu de maîtrise, on peut même changer d'arme au beau milieu d'un combo.

Les combats, justement : Rayton est agile mais ne peut pas esquiver ou se baisser, ni parer les coups des ennemis (sauf en utilisant un objet peu pratique dans son inventaire). C'est assez dommage car les bastons sont pour le coup assez bourrines et peuvent manquer de finesse sur la longueur. Certes, il est possible de dasher pour se placer derrière l'ennemi, mais on aurait aimé pouvoir faire preuve d'un peu plus de skill, comme dans l'impitoyable Hollow Knight.
Les ennemis, quand à eux, sont des "chiens" robots qui se ressemblent tous pendant la 1ère partie du jeu : le fantassin, celui avec le bouclier, le drone, le sniper... A part concernant les boss, il faut bien avouer que le bestiaire tourne rapidement en rond et qu'il ne change que rarement. Il faudra attendre les égouts (et ses grenouilles ninja) pour commencer à voir de la variété, régulièrement.

Techniquement, comme on l'a vu, le studio chinois utilise à merveille le moteur Unreal pour traduire une atmosphère poisseuse et sombre : les effets d'éclairages (ampoules au plafond, néons dans les rues...) sont très convaincants, idem pour les effets de profondeurs (même si on reste toujours sur un seul plan latéral, le fameux 2,5D). Cela offre aux environnements une dimension particulière, même si on ne peut pas explorer ce que l'on devine en arrière plan. Bien souvent, c'est superbe et ce travail rend Forge City vibrant de vie et de mystère : les quais du métro en sont une jolie illustration, l'Arsenal également... Quant à Joffre Street, c'est carrément sublime !
Si Rayton a la classe, on ne peut hélas pas en dire autant de toutes les cinématiques : celles pré-rendues sont de qualité variable, parfois très pixelisées. La mise en scène est souvent bonne, et on peut choisir entre un doublage anglais convaincant ou, plus original, un doublage en mandarin ! A l'inverse, les cinématiques in-game sont mal fichues avec un rendu de la fourure sur les animaux que l'on qualifiera sans hésitation de dégueulasse ! Dans le rayon mauvaise finition, on remarquera quelques textures qui "poppent" à la dernière seconde ou un Rayton qui "flotte" au dessus du sol lors de nombreuses transitions entre chaque zone : ça fait vraiment désordre et ce sont de petits détails qui auraient dû être gommés...
Dernier point : les temps de chargement ne se font qu'entre chaque zone (ou téléportation) et se révèlent un peu long. Cela dit, ça laisse le temps de lire les quelques tutos ou conseils proposés...
Enfin, côté sonore, c'est très bon : les BGM sont de qualité avec de belles orchestrations et les bruitages mettent dans l'ambiance. La version collector en physique propose même un code pour la télécharger : délicate attention.

"F.I.S.T" est donc un Metroidvania vraiment intéressant à jouer et à découvrir, offrant un excellent équilibre entre l'exploration, la castagne et la plate-forme. Son univers Diesel-Punk assez unique, ses environnements très travaillés tout du long, son cyber-héros charismatique et surtout son excellent level-design contribuent également à en faire un jeu dynamique et intriguant. Son rendu graphique bute toutefois sur des détails que le développeur aurait pu ajuster avec un peu plus de travail ou de moyens, idem pour quelques bugs d'affichage malheureux. Mais l'essentiel est pourtant là : du punch, des capacités qui ne demandent qu'à être déverrouillées, un terrain de jeu vaste et varié à fouiller et, surtout, beaucoup de personnalité. S'il ne parvient pas à dépasser les ténors du genre, il arrive à ridiculiser le dernier Metroid en date et mérite rien que pour cela toute votre attention : la jolie surprise de cette rentrée.