Critique film
Publié le 21/05/2019 à 18h57 par Floriane
Portrait de la Jeune Fille en Feu
9,5 /10

1770. Marianne est peintre et doit réaliser le portrait de mariage d’Héloïse, une jeune femme qui vient de quitter le couvent. Héloïse résiste à son destin d’épouse en refusant de poser. Marianne va devoir la peindre en secret. Introduite auprès d’elle en tant que dame de compagnie, elle la regarde.

Après sa trilogie consacrée à l’adolescence Céline Sciamma revient avec un film de femmes en costumes : "Portrait de la jeune fille en feu". Pour sa première sélection cannoise en sélection officielle, la réalisatrice française nous offre une histoire d’amour au féminin d’une grande puissance émotionnelle et plastique.

Grâce à une écriture très juste dans les sentiments exprimés ou retenus qu’elle dépeint, le film nous emporte par la force sentimentale de ses personnages et de leur histoire. Sciamma prend le temps (peut-être un peu trop) pour installer la dynamique de ces deux femmes qui vont s’aimer, se regarder, se créer. Car en plus de l’amour, Sciamma filme le pouvoir de l’art et de la création. Mais grâce à son regard féminin ce rapport de modèle / artiste se renverse avant de devenir égalitaire. Les deux femmes se complètent et s’élèvent. Sciamma regarde ses actrices avec une grande minutie et une intimité qui impose le respect et fait naître l’émotion.

En plus de dialogues qui touchent droit au coeur (sans doute les meilleurs de Sciamma), l’émotion née grâce à son duo d’actrices : Adèle Haenel et Noémie Merlant. Les deux jeunes femmes irradient l’écran avec leurs interprétations tout en finesse. Alors que l’on découvre Adèle Haenel plus lumineuse et vulnérable (Sciamma a écrit le film pour elle), c’est Noémie Merlant qui impressionne par l’intensité de son jeu. Elle donne vie à cette peintre chamboulée autant intellectuellement, que sentimentalement. Autour de ce couple de cinéma qui, on l’espère, fera date, le film complète son casting avec les excellentes Luàna Bajrami et Valeria Golino.

Un casting entièrement féminin pour un film qui a la volonté de faire avancer le regard posé sur les femmes au cinéma. Au-delà de son histoire d’amour, "Portrait de la jeune fille en feu" évoque le statut des femmes peintres, la condition féminine de l’époque, mais aussi l’entraide de ces femmes dans un monde dominé par les hommes. Pour cela Céline Sciamma efface la notion de supériorité ou de rang social. Dans son récit, tout se confond pour ne laisser que la sororité.

Cette envie de poser un regard nouveau sur les femmes dans le septième art est cristallisée par une mise en scène inspirée à la fois de Bergman, mais aussi de grands peintres, comme Rembrandt. Cependant, Sciamma apporte une féminité actuelle et une douceur hors du temps qui sortent le film du carcan de récit en costumes académique. Ce côté peinture intemporelle est renforcé par la directrice de la photographie, Claire Mathon, qui évite l’aspect trop naturaliste du récit pour faire glisser les images vers un imaginaire lyrique.

Si on enlève une fin un peu trop explicative, "Portrait de la jeune fille en feu" s’approche du chef d’oeuvre, tant il provoque de l’émotion avec son histoire d’amour universelle brillamment mise en scène par Céline Sciamma et portée par un duo d'actrices magnifique.

"Portrait de la jeune fille en feu" sortira dans les salles le 18 septembre prochain.

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