Critique film
Publié le 05/12/2018 à 13h55 par Floriane
Une Pluie sans Fin
7 /10

1997. À quelques mois de la rétrocession de Hong-Kong, la Chine va vivre de grands changements... Yu Guowei, le chef de la sécurité d'une vieille usine, dans le Sud du pays, enquête sur une série de meurtres commis sur des jeunes femmes. Alors que la police piétine, cette enquête va très vite devenir une véritable obsession pour Yu... puis sa raison de vivre.

Depuis quelques années, le cinéma asiatique est enfin mieux distribué en France. En particulier le cinéma de genre. Après "Dernier Train pour Busan", "Battleship Island" et "Detective Dee", c'est du côté de la Chine que nous vient la dernière sensation avec "Une Pluie sans Fin".

Réalisé par Dong Yue, dont c'est le premier film, "Une Pluie sans Fin" est un pur film noir à la sauce chinoise. Le cinéaste a avoué s'être inspiré des chefs d'œuvre du genre signés Francis Ford Coppola ("Conversation secrète") et Alfred Hitchcock ("Sueurs Froides"), et ça se sent. Dong Yue reprend les codes du genre avec son héros à la morale douteuse, les femmes à la sexualité débridée, l'intrigue policière sordide, le pessimisme de ses personnages ou encore l'ambiance poisseuse.

Ambiance qui contribue grandement à l'identité du film. Comme son nom l'indique, les personnages sont constamment agressés par une pluie incessante. Ce qui participe à la personnalité dépressive de la plupart des protagonistes du récit. Le réalisateur renforce ce sentiment en utilisant une palette chromatique composée uniquement de noir, gris et marron. Ajouté à cela le travail méticuleux sur le son de la pluie et vous aurez une atmosphère lugubre parfaite.

Bien que le point de départ de l'intrigue soit la découverte du corps mutilé d'une femme, l'enquête n'est qu'un prétexte pour mieux parler de la population chinoise lors de la crise du pays des années 90. Le retour de Hong Kong à la Chine entraina un bouleversement dans la société, en érigeant notamment de grandes barrières sociales. Les ouvriers ont été les plus touchés par ces changements avec la fermeture de nombreuses usines. Une grande partie de la population fut abandonnée au profit des plus riches. C'est cet abandon et désespoir que raconte Dong Yue à travers le personnage de Yu Guowei. Quand nous faisons sa connaissance au début du film, il est chef de la sécurité d'une usine et récompensé par ses supérieurs pour ses qualités professionnelles irréprochables. Mais au fil du récit et de l'abandon des habitants par l'Etat, on le voit sombrer et s'accrocher à la seule chose qui lui rappelle cette époque "bénie" : la quête du meurtrier des femmes tuées près de son usine.

Avec son sous-texte politique et social, "Une Pluie sans Fin" s'ajoute à la liste des films asiatiques qui parle intelligemment des problèmes sociétaux de leurs pays en utilisant les codes des films de genre. Le film de zombies pour "Dernier Train pour Busan", le film de guerre pour "Battleship Island" et le film noir pour "Une Pluie sans Fin".

Avec "Une Pluie sans Fin", Dong Yue signe un premier film à l'atmosphère soignée et au propos intelligent. Un réalisateur à suivre.

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